mardi 29 mars 2016

#64 - Une autre bribe d'affichage

"Tu sais Félixe, j'ai ramené des poèmes chez moi, j'ai mis les papiers dans mes plantes et j'ai envoyé la photo à mes nièces. Elles étaient ravies !" me dit P. dans l'odeur du café.

*

"C'est VOUS Madame, les poèmes affichés partout ?!"

*

"J'ai récupéré CetteClasseLà, et je leur ai lu des poèmes. Ils m'ont dit que CollègueIntimidant leur en avait déjà distribué une liasse !"

*

Alors qu'on est chacun sur le seuil d'une porte, O. m'arrête:

"Merci pour tes poèmes, Félixe, j'en ai ramené chez moi, c'est super. Même dans le couloir, les escaliers, je me suis arrêté pour les lire, et j'ai fini par me cogner dans les gens, mais bon... vraiment, c'est bien !"

*

Ne soyons pas complètement mièvres, la poésie ne changera pas le monde.
 Je suis tout de même ravie qu'elle aide à rencontrer les gens, même si c'est parfois en se cognant.
Ravie qu'elle continue sans cesse à changer le mien.

lundi 28 mars 2016

#63 - Une bribe de pas gentille

Apprendre à se carapacer,
                     se carapater
                                         en riant au soleil
Ne plus vouloir être gentille                          trop
Ou pas n'importe comment
Ou sans se sacrifier

Ou plutôt : sentir que la gentillesse vaut bien plus que cette acceptation indistincte

Ne rien brader, en donnant tout,
                        à n'importe quel prix

Enfin, sentir ce chemin là défriché
                                                   En riant au soleil





*
(L'avaient bien dit, Célar, Clo, Sandilla, Clé, T&A... - l'avaient bien dit et maintenant, ça se sait. Merci)

#62 - Une bribe de jeux démultipliés

Des cadeaux glanés dans les boutiques qui débordent de "oh, et ça, t'as vu ça?!", des carnets décorés, une table de petit-déjeuner avec du lemon curd, de la gelée de tomates vertes, un pot de nocciolata et du salidou en même temps, des retrouvailles dans la rue d'Or, un roman qu'on se lit tour à tour -oh si parfait (pour nous, aujourd'hui), des "cataplasmes de poésie"*, des discussions qui disent les déceptions, des collages à offrir, quatre tablettes de chocolat, "travesti de vos jouuuuurs, travesti de vos nuihihiiiiits", une cuisine qui s'éclaire, s'échauffe et laisse flotter une chaleur simple, un film lui aussi parfait (pour nous aujourd'hui, toujours), des lâchetés balayées d'un éclat de voix puis de rire, des trucs qui se disent, des bidules qui se taisent, des "c'est beauuuu" avec des minis trémolos et des "oh non :" insurgés, tout. 
Ce dimanche pascal ne ressemble à aucun autre.
Jouer le jeu, bien sûr. En suivant nos propres règles, si possible.


*Esmé Planchon

dimanche 27 mars 2016

#61 - Une bribe de 3:23

Il est tard,
Et même encore plus que
S. a posé des sardines en chocolat sur la table
On se mélange les conversations
Il est tard
Tard
Et même encore plus que
Parce qu'il y a eu les achats de dernières minute, 
Le bar 
à vin à quatre
à parler de philosophie, d'enseignement, de féminisme, de grève, de
a se parler, longuement

Il est tard et les mots s'échappent par les baillements
On fera mieux demain

vendredi 25 mars 2016

#60 - Bribes de sensations à la ville avalée par Pia

En dévalant les escaliers, les rues en pente douce, les allées, Pia entend chaque mouvement du tissu. Le sac lui revient contre la hanche, à intervalle régulier, ça fait un rythme sourd. Ploup Ploup Ploup. Ses chaussures noires ont été râpées par le sable. Elles font peu de bruit et donnent aux pas la légèreté, l’élasticité qui leur manque. 
Dans les oreilles, il y a les White Stripes, puis Tiersen, Eminem, et enfin Nina Simone. Aléatoire et pourtant tout lui va comme la robe, celle à rayures. Elle sent la musique lui couler sur la nuque, entre les omoplates, et la rendre à la danse intime des jours. Il faut refréner les gestes qui se dessinent dans ses membres et qui se pressent contre la peau, de l'intérieur. Ils seraient justes mais incongrus : c'est une petite ville, on ne sait jamais qui on peut bien croiser. 

Elle se sentirait presque jolie. Enfin, ce n'est pas le mot exact, mais ça s'en rapproche. Disons que Pia se sent évidemment là. Que ce qu'elle a aperçu dans la glace de l'entrée correspond à ce qui se file à tous les étages,  à cette audace conquise un écheveau après l'autre et l'air arraché aux lourdeurs des derniers jours. Bouffées de joie inexplicables. Elle a l'impression si rare de se ressembler, dans ce qu'elle a de meilleur. Alors tant pis si c'est trompeur. Si l'aileron noir au dessus des yeux triche un peu. Ses yeux s'envolent un peu plus haut. Tant pis si personne d'autre ne le voit. 

"Oh ! Que tu es jolie !" s'exclame C. en ouvrant la porte. 
Vanité légère, presque vanillée. Sans oublier le mascara ni la mascarade. 



jeudi 24 mars 2016

#59 - Une bribe de vanité

Depuis, il y a eu 
                       les premiers pas à ployer
             il y a eu les 
                       nuits de copies de
                       cauchemars
                       sensations d’incompétence
                       dilemmes cornéliens et élèves ramenés dans le cartable
                       heures au téléphone avec les parents à demander de l'aide pour
surnager
            il y a eu les conflits et les mots aiguisés plantés ici ou là
                      exclusions, excuses, colles et 
         
            il y a eu l'année des larmes
                       et un arrêt de trois semaines, pour arrêter de s'abîmer

                        et des moments à hurler, dans les poumons, la gorge, le ventre, la
                        classe pas
                        classe 
                        cours, cours
                        toujours
se demander si vraiment,
et pourquoi
et comment

alors quand elle interpelle avec un sourire large, qu'elle raconte "Madame, les cris de joie dans la salle, quand ils ont dit..."

ça se rappelle tout ça
mais avec,
        avec tous les autres éclats
                                                         de rire, de confiance
                                les tessons de verre finalement mis aux soleil, à chatoyer les côtes
                                ch'amarrer 

On n'est pas arrivé
Non, sûr que non
Mais c'était bien de tenir
                                    bon, et de découvrir ces justesses 
                                    là

(Et s'autoriser une minute de vanité)
            

mercredi 23 mars 2016

#58 - Une bribe d'immobilité

Parfois, il y a toutes ces couches d'immobilités, comme des enveloppes autour des organes, de la peau. Les fluides se figent un peu. Tout ralentit.
C'est l'image que je me fais de l'hibernation.
Certains jours, il faut longtemps pour les laisser glisser, une à une, pour que le sang cascade à nouveau plus vite, pour se lever. Faire ce qu'il y a à faire.

mardi 22 mars 2016

#57 - Une bribe de Dick Annegarn



"Bruxelles, ma belle..."
Chantonner dans sa tête, accrocher des poèmes aux murs, les recopier, les plier pour ne pas se laisser coloniser par tout ce qui émerge.
Pensées, mille.



lundi 21 mars 2016

#56 -Une bribe de lundi au soleil

Matin couleur citron, à profiter encore un peu du printemps tout neuf. 
Prendre le temps de petit-déjeuner en semaine fait l'effet d'un surplus infime d'existence, comme la pointe de caramel au beurre salé qu'on dépose sur la compote sans sucre. 

Cela se troquera bien sûr contre une journée sans déjeuner et une soirée au lycée. Mais c'est un prix juste. 

*

Les collègues qui piochent dans les feuilles éparses et les regards des élèves intrigués. De la poésie sur les murs. Respirer. 

*

En rentrant, il fait nuit depuis quelques temps déjà. 
Un personnage sur l'écran
"Je crois que ma vie leur semble vide et sans rebondissement". 
Sourire de l'avoir dit si souvent. Sourire en pensant à la vie aussi vaste que les steppes, les canyons et les montagnes. Et au plaisir que ça ne se lise pas, bêtement, d'un simple regard. Jouer les idiotes, n'avoir l'air de rien, l'amusement depuis longtemps. 

*

C'était un lundi ensoleillé, qui le sait ? 

dimanche 20 mars 2016

#55 - Une bribe de dimanche à s'étendre

Sur la place, ils arrivent, goutte à goutte. 
Ceux d'ici. Et ceux d'un peu plus loin - que jusqu'au dernier moment on n'était pas sûr de. 
Chacun avec cette envie de soleil et de brassées d'air frais, en terrasse. Le soleil est timide, et l'air un peu trop frais. Mais c'est un détail. Sur la table, les commandes se rajoutent. On joue au printemps. On joue aux beaux jours, oh les beaux, et ça sautille, comme des moineaux, de thé en Perrier, de cappuccino en gaufre, de la ville à la rivière. 
Il y a les cous qui se rétractent sous le vent en pensant aux écharpes restées au porte-manteau. Mais on ne s'en veut pas trop parce qu'on a laissé aussi les soucis aux porte-manteaux. Il y a les mains ratatinées de froid -  "je vais jeter mon mégot" dit-elle pour la deuxième fois. Il y a L. qu'on recroisera plus loin. Sur le coin des tables et des murs, des conversions qui pirouettent soudainement d'un sujet à l'autre. Et nos pas lents. La rivière a sorti ses verts, ses lumières, ses brumes. Encore un peu d'hiver.  
Etre là, ensemble, les mains sur les bras, les pieds dans le monde et les pensées hors du temps. On sait bien qu'on retrouvera tout au porte-manteaux. Mais il y aura un peu plus de force pour dérouler demain et se le déposer dans le cou, comme un refrain. 


#54 - Une bribe d'être vivante

Seulement ça.

être vivante

                                            (le droit d')



#53 - Une bribe de feu d'artifice impromptu.

Faire autant de route pour un navet ce n'est pas raisonnable.
Pas éco-nomique-logique.


Mais tout ça valdingue après la fatigue, dans la trace des spasmes , puis se dissout dans le camaïeu des bleus préférés, ceux qui résonnent absolument avec la lumière des lampadaires. Ceux qui continuent de filer des coups de poing à l'estomac.

(C'est peut-être ça, le truc, finalement. Trop de coups de poings à l'estomac)


(La blouse en papier qu'il fallait porter avait d'ailleurs une teinte agréable de ce genre, quoique moins nuancée - ça fait une chose à laquelle se raccrocher, le bleu du papier)

Sapristi, on avait oublié que c'était si fort.

Il restait une aiguille de culpabilité dans cette botte de bleu .Elle a disparu quand, dans un petit village au nord-ouest de la route, un feu d'artifice a surgi juste au dessus de la cime des arbres.

Alors, ça peut pousser, comme ça, un feu d'artifice, même si c'est pas la saison ?

Ralentir, quitte à emmerder la voiture de derrière, ouvrir les fenêtres en grand pour entendre les détonations et sentir la poudre.

En profiter tant qu'elles sont encore synonymes de joie. De peur qu'un jour la peur vienne gâcher la fête.C'est déjà le cas dans tant d'espaces.

#52 - Une bribe de menthe sur le trottoir

Impossible de remettre la main sur le trèfle vert clignotant offert par K. il y a. Pfiou.
C'était en. Dans une autre vie. Loin.
Sans nostalgie mais avec l'envie, quand même, d'y retourner un jour.

Sur le trottoir, du monde, beaucoup. Des chapeaux Guinness, une camionnette pour servir les bières même pas irlandaises. Tout cet attirail surfait qui sert de prétexte, beaucoup.
Sur le trottoir, on regarde les gens. C'est le jour de l'année où on croise un inhabituel attroupement de trentenaires dans cette petite ville un peu vieillissante. Des visages pour beaucoup inconnus - on élabore des hypothèses pour comprendre où ils se cachent le reste de l'année.
Sur le trottoir on trinque.Ils ont leur bière. Moi, une menthe à l'eau. Pas le choix. Ca fait sourire, mais c'est vert, au moins.

Une gorgée, ou deux.
Trinquer à notre santé, avant demain.

mercredi 16 mars 2016

#51 - Une bribe d'affichage

Personne ne saura toute la fatigue et le manque de sommeil qu'il y a derrière l'affichage massif de poèmes dans les couloirs divers.


Et c'est tant mieux.

Il ne restera que l'écume, que la fleur, que les mots.

Que la poésie résonnant, inlassablement.

#50 - Une bribe de dénouement

Parler de ce qu'est un dénouement
En faisant des nœuds de papier, et en les défaisant.

Ils voient un peu, pas trop quand même.
On essaye alors de comprendre pourquoi, à la lecture des dernières lignes, K. s'exclame "MAIS !? Madame, ça se termine comme ça ?"

Et puis, E.finit par dire "Mais y'a pas de dénouement, il meurt, c'est tout".


Rire, et puis garder ça en tête.
Il n'y a pas de dénouement. On meurt, c'est tout.

lundi 14 mars 2016

#49 - Une bribe de grand écart

Chose qui rend fou

L'écart entre ce qu'on dit et ce qu'on fait.
Bien sur, la représentation, bien sûr, nécessaire, bien sûr interprétation
Bien sûr
Bien bien bien

Mais


Quand on dit "socialiste"
Et qu'on détricote les mailles du tissu social

Quand on dit "oui, bien sûr"
Et que néant ensuite

Quand on dit "je vous tiens"
Et qu'on laisse tomber.

Quand on dit "voici vos nouvelles tenues de travail"
Et que le lundi suivant, l'atelier est vidé de ses machines

Quand on dit "les jeunes sont l'avenir"
Et qu'on ne les engage pas, ils n'ont pas d'expérience

Quand on dit "je vais te présenter ma famille"
Et que deux jours après on s'est cassé

Quand on dit "j'adore les femmes"
Et qu'on passe son temps à faire des blagues humiliantes ou à mettre des mains aux fesses

Quand on dit "nous, dans l'art, la culture, on a le sens du social, on est de gauche"
Mais qu'on tient sur des stagiaires ou des services civiques sous-payés et déconsidérés tout en leur en demandant toujours plus.

Quand on dit "C'est important"
Et qu'on ne trouve pas le temps.

Quand on dit "tous ces jeunes mal élevés, quelle honte"
Et qu'on hurle "salope" à une préfète dans une réunion publique

Quand on dit "je suis féministe, je considère les femmes"
Et qu'on leur explique en permanence pourquoi elles ont tord

Quand on dit "Je ne suis pas raciste"
Et qu'on ajoute un "mais"

...

La liste est infinie.

Les muscles de la langue claquent
Et les mots me font peur.


#48 - Une bribe de calendrier

Dans les cases ranger ce qui reste
Affaire de jours
Et d'heures

Cours des choses
Heurté
ViteViteVite
Avancer

"On a un programme"

Ca fait guide touristique.
Ou homme politique.

"On a un programme
programmé".

Jamais assez de temps, évidemment,
Pour se couler dans le lit de la rivière
Et suivre notre cours

Il faut que ça tempête, que ça déborde
Pressés
Jus de pensées

S'en tenir au calendrier.

samedi 12 mars 2016

#47 - Une bribe de météo sous-marine (à peu près)

Le niveau de la colère monte régulièrement, lentement mais sûrement. 
Quelques côtes grignotées. 
Quelques chairs immergées. 

Saine colère que celle qui ose affirmer
Ce que de soi, on n'abandonnera pas sur la table
Ce qui de soi, n'est pas négociable. 
Indivis 

On vaut mieux que ça, dièsent-ils

Fonte des pôles lithiques. 
Et des pôles caverneux
Fonte des lâchetés, et des complaisances, à petit feu


La colère monte, et les résistances chauffent
A tous les niveaux de l'amer

Oui, mon glaçon, 
Oui, pays empaillé
Les silences finiront par nous laisser de pierre
Lapiazée
On se jettera sur les vitrines
Dans les machines
Avec un bruit d'éclat de rire échappé et indécent

On se jettera en dehors de l'attente
Se soustraire

Quitte à ne plus y croire
Danser sur les pavés
Déjà

On ne se remettra pas à plus tard
On vaut mieux que ça 










#46- Une bribe d'esperluette

On se lit les papiers, autour de la table
dépouillés

Il reste du café dans les gobelets en plastique.
Des rires et
tout le reste
surtout

Changer de focale et se voir à la table comme au festin métaphorique de la ville.

Se lire des histoires
Imaginer les gens derrière.

Anticiper le cri qui les libérera, dans l'air
Les évocations qui nous convoquent, là, et nous lient pour l'heure

"Et je crie."

#45 - Une bribe de 4h du matin

En fermant les volets, un oiseau craille.
"Ca faisait longtemps".
Il vient prendre un peu de ma fatigue dans son bec.

Ca ne m'avait pas manqué les nuits de copies. Mais le pépiement des oiseaux dans le parc déserté...

jeudi 10 mars 2016

#44 - Une bribe de jour de manifestation

(A défaut d' analyser et décortiquer ce qui a pu se dire ou se faire aujourd'hui - d'autres le font cent fois mieux - un petit écho)

J'aime les rues de cette ville, comme j'ai pu en aimer d'autres, comme j'en aime encore ailleurs et différemment. En y marchant, à n'importe quelle heure, il y a toujours de quoi se mettre un peu de curiosité sous la dent.
Y marcher, trop vite parce qu'en retard en retard, ou en flânant. Y piétiner, y hésiter, y traîner quelques fois.
Y manifester.
On voit la ville et les gens d'un autre œil. D'un autre pas.

Aujourd'hui, malgré ce qui était prévu, je n'ai pas pu. Mais quand même, quelque chose dans la rue a frémi, et ça se sent encore. Il y a des indices. Les stickers, quelques affiches et un lointain grésillement. Mieux, un grondement.

Un personnage d'A Midsummer night's dream promet qu'il va "rugi[r] comme un rossignol". C'est beau. Mais à bien y réfléchir, je crois que je préférerais corailler comme un lion.

mercredi 9 mars 2016

#43 - Une bribe de 8 mars

Journée de la ?
Journée internationale du droit des.

Nuance.
De taille.


Dans la rue de nuit, se dire que les oreilles n'ont pas trop saigné cette année.
(Puis réaliser que le travail a tout réquisitionné, et qu'on n'a donc pas allumé de radio, de télé, pas traîné au bar ni sur les réseaux sociaux - ceci expliquant peut-être cela).

Mais la fatigue quand même. Celle du quotidien.Celle qui raidit les bras ayant ramé avec une chaise de jardin.
Et les pointes d'espoir, les avancées minimes. Comme quand on choisit de faire plutôt le printemps des poétesses.
Marcelline Desbordes-Valmore, Ananda Devi. Maram Al Masri. Louise Labé. Louise Michel, Rola Hassan, Sapho, Sapho d'aujourd'hui, Albane Gellé, Jeanne Benameur, Marie-Claire Bancquart, Hélène Cadou, Alicia Martinez, Valérie Rouzeau. Annelyse Simao, Mary-Laure Zoss.
Quelques noms comme ça. Pour la rime ou le rythme.

Dans la rue de nuit, des clins de l'oeil aux marraines qui s'ignorent.
Et la joie, et la chance, de rejoindre une chambre à soi, et un peu plus que ça.
Dans la rue de nuit, compter les chances qu'on m'a données, et celles qui  se conquièrent.

Demain, prévoir d'être encore dans la rue, de jour cette fois ci.
Parce qu'il est illusoire de penser que cela peut ne pas nous concerner.

mardi 8 mars 2016

#42- Une bribe de khôl

Les ailes déployées sur l'étendue d'émail blanc. 
Le corps qui déteint sous la pluie. 
Le noir de jais. 
Tout est là, un instant. On piaille avec l'oiseau sombre qui s'est délié dans la rétine. 

L'alarme rappelle que le matin n'attend pas. Le regard se rappelle soudain que l'oiseau n'est qu'une pelure de khôl au fond du lavabo qui bave toute son encre. 

Il faut passer le jet pour oublier la déception. 

Effacer le noir de Geai. 

lundi 7 mars 2016

#41 - Une bribe de Shakespeare (carrément)

Plonger avec délices dans A Midsummer night's dream, (dans une édition bilingue avec une traduction des Supervielle) (à force de causer traduction...)  
Se délecter de tout ce qui a pu agacer dans le passé.
Quel éclat, quand même. Et quelle langue ! 

[Dans la première scène Hermia souhaite épouser Lysander, mais son père veut la marier à Demetrius]. 

HERMIA 

So will I grow, so live, so die, my lord,
Ere I will yield my virgin patent up

Unto his lordship, whose unwished yoke
My soul consents no to give sovereignty.

[Et donc, comme elle refuse on lui explique que soit elle accepte, soit elle meurt, soit elle fait vœu de chasteté pour servir Diane. Mais Lysander intervient avec un argument de choix]

DEMETRIUS
Relent, sweet Hermia - And Lysander, yield
Thy crazy title to my certain right

LYSANDER
You have her father's love, Demetrius
Let me have Hermia : do you marry him. 


Traduction par Hugo fils en cliquant là.


dimanche 6 mars 2016

#40 - Une bribe de galbe

« Quand je galbe, ça va »
Dit Celar en poussant la porte de la Buvette.


Importance des mots dans ce jour
Ceux de Rebotier lus par Mme F.
(Ah, Madame F. !)
Et ceux de cette poétesse là
Qu'elle n'a pas l'habitude de lire en français
Mais...
Mais.

Printemps des poètes café au lait
Pluie et rayons
Chocolat chaud, paroles
Et le Soleil d'automne

Tout boire à longs traits.

L. parle de mesquineries ou de marionnettes avec son accent
merveilleux

Celar
tout ce à quoi nous tenons, à quoi il faut tenir
Bon

Alors ça résume bien l'immense richesse de cette journée.
Au delà du tango
Dans la vie, la poésie


« Quand je galbe, ça va ». 

#39 - Une bribe de parcmètre

"Tu vois que je ne suis pas ivre, j'évite encore les parcmètres !"

La journée longue et lourde a fini par glisser par terre.
Plof.
Elle a cédé à.
Cédé sous
Les choses qui se racontent dans le bar à vin
Et les voix cassées qui résonnent dans les rues désertées
Les rires de quand on finit par lâcher
Prise de
Terre à
Terre.

"Et les panneaux ?
- Tu rigoles, ils sont bien trop hauts !"

vendredi 4 mars 2016

#38 - Une bribe de lacet lacéré

[Cette bribe a été altérée, je ne sais pas comment... voici tout ce que j'ai pu en récupérer... des bribes.]

Couper les fils du corset". Voilà ce qui revient non seulement dans les derniers textes mais aussi dans.les dernières semaines. ... 

D. expliquait un jour qu'on a tendance à souffler plus vite qu'on inspire. 
Dans un dernier souffle. Mourir. 

(Et Lola Lafon chante "chante "... trois descendants zélés d'un maréchal appuient trop fort sur tes poumons alors inspire et... expire.")

Toujours eu plus de mal à inspirer. Poumons prématurés, peut-être. Place qu'on prend déjà trop et qu'il faut réduire. Ou souffle retenu en attendant que quelque chose se passe. Hypothèses, plein. [réponse, sans]

"Laisse toi respirer" dit-elle.
 Aujourd'hui, elle ajoute "Tu sens peut-être les lacets du corset qui lâchent".   
Tiens donc.

 Ouvrir, oui, mais fermer aux parasites.
Lâcher sans être lâche.
Ouf. Les mettre en fuite.
 Pfuit pfuit pfuit. 

Continuer à couper les fils du corset.

   
            

mercredi 2 mars 2016

#37 - Une bribe de vin blanc chaud

Mercredi, Mona et Mona font le "point demi" de la semaine à moitié remplie.
Chercher le "Vous êtes ici" sur la carte des cicatrices. Sur celle du travail. Sur celle des projets. Sur celles des envies. Raconter comme ça va, ou plutôt vers quoi ça va.  Se donner des nouvelles ou plutôt faire le suivi. Se dire comment on est arrivé ici. Quelques pourquoi comment qui flottent. Et de la pluie.

Au début, elles allaient prendre le thé. L'été, Perrier citron - une rondelle et un sirop - ça fait un peu Dupond et Dupont. Ou une bière quand l'après-midi commence à se tirer. Ce jour là, un vin blanc chaud fume ses épices dans le troquet bleu.

Avant cette vi(ll)e, Mona n'avait jamais aimé les rituels. Elle a appris qu'en débarquant, ça faisait des points auxquels s'amarrer.


mardi 1 mars 2016

#36 - Une bribe d'écorce

Lorsque la main se tend, que les les doigts s'allongent dans la continuité de la paume, la proximale rentre dans le rang. Les quatre collines qui dessinaient le paysage se sont affalées sur elles-même, et voilà que la peau rêche fait des plis, des creux. L'articulation des phalanges et des métacarpiens ressemble maintenant aux nœuds pleins de sève séchée des arbres centenaires.
 *
En faisant bouger les doigts sur un clavier, fut-il fait d'air, les tendons extenseurs sursautent comme des rainures. L'écorce devient membrane. 

De l'arbre à la feuille, la main joue à se faire végétal.
*
Mains d'hiver et de vielle dame. Cuir aguerri par les vents de l'hiver. Toile à chrysalide, transparente, percée au moindre souffle. La tendresse s'est muée en une sorte de raideur. 

Apparemment. 


#35 - Une bribe d'Ubu

Cette sensation étrange d'avancer dans ce métier en en maîtrisant de mieux en mieux les codes. Et en même temps, de moins en moins comprendre la logique de l'ensemble.

 Jours un peu ubuesques.
Peut-être pas les mêmes que ceux de Mélie au grand K. Mais quand même. Merdre.

Heureusement qu'ils y a les ados et leur spontanéité, leurs enthousiasmes fulgurants et leurs flatteries un peu trop appuyées. Heureusement qu'il y a les collègues qui viennent parler du Printemps des poètes ou qui s'inquiètent de savoir comment se passe la rentrée. Heureusement qu'il y a des chefs compréhensifs et efficaces. Heureusement qu'il y a le sourire de ceux qui bossent à la Vie Sco. Heureusement qu'il y a des gens qui font discrètement en sorte que l'endroit soit tous les jours propre, accueillant, agréable.

Se dire ça.
Heureusement qu'on trouve entre nous la considération réciproque qui ne viendra jamais de l'institution.