lundi 12 novembre 2012

A Vapeurs

Quelques coups frappés à la porte
"Si" contre le dos, épineux
Juste avant qu'un "oui" ne la sorte
D'un repos solide et noueux

Le coeur se tord sous la poignée
Les yeux s'échappent de leurs gonds
Qui aura compris le premier
Que ce visage est bien le bon ?

Les doigts soudain sont tous cramés
La joue craquelle sous le regard
Et se mélange les apnées
Devant le corps tracé si tard

Le corps dessiné d'insomnie
A l'inconnu du bout des doigts
Convié dans l'antre, noirci
Par le sommeil et les abois.

Le sourire est fouillé, pillé
Archéologie de l'attente
Mais si la machine est rouillée
Que disait l'oeil ? Que dit la menthe ?

La bille a trouvé son chemin
Et le papier lui est donné
Dans le regard, encore un bain
Un sautillement, pointillé

Et la porte comme une paupière
Claque, interdite, sincère
.Laissant au vent les quelques lierres
Qui s'enroulent au chemin de fer.






jeudi 8 novembre 2012

Logo-rallye musical #1 - Les champs sont fertiles ?


A défaut d'avancer sur le NaNo, je m'amuse avec les consignes oulipiennes. Ce soir, logo-rallye musical. Je lance une liste de chansons francophones. La règle : écrire un texte en intégrant au moins une expression ou une phrase de chaque chanson écoutée, et ce dans l'ordre, en même temps que passe la chanson en question. 


"La ville aval[ait] ses voitures comme un long ruban d'étincelle" dans mon crâne. Et l'ombre de la campagne environnante me vrillait les oreilles. Dans le soir, cette campagne a le calme un peu inquiétant. Ou apaisant, c'est selon. Comme il n'y plus de lumière après vingt-trois heures, les pensées des habitants encore allumés se projettent par la fenêtre. L'hémisphère tout entier se voit repeint, comme les murs de la chambre sous la lanterne magique. "Dans le couloir et les vieux escaliers du corps", le ciel, lui aussi, fait ses roucoulements d'ombre, ses volutes de pupille. Et il grince des dents contre les os de feuille qui tremblent. A cette heure, cette heure qui n'est jamais la même sur l'horloge, les lumières de paille se blottissent dans l'encre. "Pas de goutte, ni de danse" dans le village dépeuplé, mais mes yeux photophores laissent glisser le ballet des feux de croisement et des feux tricolores des villes hémorragiques sur la fin de journée. Ma tête est une ville dont je ne connais toujours pas le nombre d'habitants. Non, je ne suis pas toute seule. Mais combien sommes-nous, ainsi blottis, aux lisières de la nuit ? "Ernestine, tu entends des voix, reste digne", me rappelle parfois un ami. J'entends à son air inquiet qu'il dit "des voix" avec un "x", alors que moi, je dirais plutôt des "voies" avec "es". Ma tête est une ville, avec des chemins de traverses, et parfois quelques quatre-voies. Une ville entre Saint-Cirq-Lapopie et Los Angeles. "Et le corps au calme comme sur ces îles", ce corps qui soutient ma tête, est une argile, un morceau de terre, dans lequel le végétal a planté ses dents, profondément. Entre les collines, leurs vignes, et les bois aux cimes illuminées, des villages se cachent, accueillants, discrets, éteints si tôt la nuit. Il y a aussi des torrents, ces torrents de montagnes, qui me parcourent au printemps, et qui s'amenuisent, en veille, l'été. Mon corps et ma tête sont comme un pays, "avec un nom qui fait mal". Mais qui vibre sous la langue comme des piments oiseaux.
"L'amour t'a faussé compagnie", me susurre ce nom. "Pas vrai, que je lui réponds sans me démonter, même pas vrai. Sans amour tu crois qu'il y aurait ces ponts et ces fossés, ces colchiques dans les prés ? Même "l'aube en sort toute retournée". Il faudrait être aveugle, pour passer à côté." Pourtant, loin, une racine frémit de ce vent interrogateur. Comme on lève un sourcil, comme un creuse une ride, le doute très léger sous la voix forte. Si l'amour avait déserté mon pays, s'était retiré comme une vague, hors de chez moi. Poussé dehors par ces choses, "des choses qu'on ne donnerait pas pour rien, comme ça". Des choses avec des tessons et des boucles dorées. Des choses chauvines, qui recréent parfois des frontières de vitre à mon pays qui a tant essayé de s'en débarrasser. 
"Pas si tristes, finalement", répond l'océan qui roulent des cailloux dans le plein de mon ventre. Que ce soit cet oragé de premier plan qui se hasarde à me répondre est bien le plus rassurant. Les arbres acquiescent  en un murmure de choeur. Et, rassénérés tous, "quand ils meurent, ou s'endorment, c'est dans la chaleur" de leur propre voix, celle qui nous berce, la ville et moi. Le sommeil me tire les cils par la manche. Les boulevards se vident, peu  à peu. La quatre-voies aussi. Tout est plus calme, et un instant, il suffit de croire au silence. "Il me semble l'entendre gratter à ma fenêtre". 


Et par ordre d'apparition : William Sheller, Allain Leprest, Bertrand Belin, Noir Desir, L, Michèle Bernard. Alain Bashung, Yann Tiersen, Noir Désir, Thomas Fersen