mercredi 31 octobre 2012

L'aube à minuit

La nuit est claire. Si claire, si tendre, que c'est le goût de l'aube qui enrobe les cembres. Le goudron se déroule dans la lumière d'hiver. Dans l'impression de vie polaire. Les arbres comme des morceaux d'encre, enfilés sur le front des collines, se détachent sur la rétine  Bien assise au théâtre d'ombre, je me réjouis du bleu pierre, de ces paysages déserts. Et seule au monde, je redessine des forêts, des vallons, des maisons, des mappemondes  et des lampadaires. Et la plaine, comme à la bougie, m'offre ses puits et ses replis. L'envie d'une couverture, et de veiller. De regarder des heures durant le ciel comme s'il allait se lever. De vivre encore un peu l'autre côté du miroir que me propose le soir. Auquel m'invite le bleu des échymoses. J'ai pris tous les prétextes pour enrouler la route, pour enrôler les doutes encore un peu plus loin. J'ai pris tous les prétextes, au fond du coffre, pour découvrir le vert sous son jour le plus nuit, sous ses airs les plus bleus. Pour regarder les villes inconnues enfin éclairées. Dans ce pré, je me souviens, les deux ânes embrassés. Et je m'amuse des vaches, blancs fantômes de peau, debout contre la suie. La nuit n'a plus qu'un oeil, je me demande qui a bien pu crever l'autre. Qui a bien pu fermer la lune dont on sent encore l'ombre s'échapper. Une pour deux, il faut admettre qu'il y a un vide. Une pour deux, il faut permettre les quelques rides. Une pour deux, dans la nuit d'hiver, polaire, désert, lunaire. Claire. Claire est ma nuit, je l'ai toujours dit.  

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire