En revenant hanter la salle des machines du blog. Je retombe sur cet article, dans les brouillons. Je me demande pourquoi je n'ai pas appuyé sur "Publier". Et puis je me rappelle que j'ai tout fermé à la hâte quand j'ai envoyé par erreur un message à des élèves avec l'adresse mail qui correspond à ici. Maintenant que tout est nouveau, l'établissement, les élèves, l'année scolaire, il n'y a plus de raison, vraiment, alors je vous laisse cetétatlà.
"Pourquoi faut-il que tu te mettes dans cet état ?"
"Qu'est-ce qui te met dans cet état ?"
Et caetera.
Cet état des choses, des lieux, cet état sans majuscule.
Sept états membres dans l'union de ce moi, cet état fédéral, ouverture ou repli, aux frontières de l'oubli.
Cetétatlà.
Comme un échalas en moins droit, un étale en plus las ou un été là-bas.
Les mots me passent au travers. Il fait nuit encore une fois. La fatigue me saisit devant les innombrables travaux d'élèves qui surgissent dans les boites mails et quand je ferme tout, impossible d'aller dormir. Il y a encore de la musique dans le casque et le fourmillement au bout des doigts.
Je suis dans cet état là.
Celui qui me pousse à rester sur le clavier ou à reprendre un carnet, à rester dans le bureau. Celui qui me pousse à silencier les envies de sommeil.
Curieux comme cetétatlà, qui parait être le plus sensible, le plus présent, le plus ancré me requiert et m'absente de tout (attention, ça ressemble beaucoup trop à absous de tant), me soustrait à la lourdeur du sommeil, à l'invitation moelleuse du lit.
Cetétatlà, comme si tout ce qui vagabonde à l'intérieur était soudain dehors, plus fort, beaucoup plus fort que le corps au présent, que les bras amoureux, que la tiédeur du lit, que le souffle endormi, que le délassement tant attendu.
Parfois j'ai peur de le perdre, cetétatlà, de me dissoudre dans le confort de la maison, de la raison. Parfois je le perds, je crois. C'est une des raisons (et j'entendais déraison) pour laquelle je n'écris plus beaucoup ici et là. J'égare plus souvent mes nuits dans le sommeil et je délaisse l'île à rhizome qui me tient lieu d'écriture. La douceur m'agrippe et s'en extraire est difficile.
N'y-a-t-il donc que la fatigue pour arriver à ce dépouillement nécessaire, au coeur des choses ? Que l'épuisement de toutes les autres ressources pour effeuiller enfin la peur et arriver là où il y a assez d'évidence pour que les mots se suivent et s'entraînent ?
Ce soir je m'interroge sur cet état là. Celui qui tient mes yeux hibourrifés et mon sang en haleine, qui me tend vers la page.
Pourquoi faut-il donc que je me mette dans cet état ?