lundi 25 avril 2016

#86 - Une bribe de peinturlure

Sur le goudron, des feuilles poussent, des pinceaux jouent aux herbes folles. Des marqueurs, des gobelets, des tubes, des bombes de peinture, des ciseaux, des crayons à papier, des brosses poussent et s'éparpillent. 
Certains flâneurs se connaissent, d'autres pas. 

En arrivant dans cette cour aux airs de jardin, tous sont là déjà, ou presque. Il faut réviser les prénoms. Se faire la bise comme si on se connaissait. Il faut... ne pas trop savoir par où commencer. Prêter un crayon ici, une gomme là. Reluquer les feuilles A2, ou la tapisserie ; ça paraît grand. 

Alors, on pioche A4, et on plonge seul, au crayon, comme pour ne pas déranger. Ca paraît un peu ridicule, alors on récupère un pinceau et on trace maladroitement le fond et la forme, la feuille et les lettres. On fait des oranges de couchers de soleil et des bleus à croire encore aux lendemains. On fait des verts dans lesquels se rouler, des rouges pas trop sanglants mais quand même francs du collier. Et du noir, oh du noir à s'envoler, noir sans fond des pupilles et des ongles incarnés.

A côté, il y a le carnet des mots qu'il faudrait faire rayonner, résonner, RAISONNER. Radoter peut-être. Ce sera l'obole modeste apportée au trésor collectif, des mots qui empoignent. 

Il faut toujours viser la tête. 

A côté des couleurs qui s'étendent comme un dallage brouillon sur le goudron, ça rit et ça discute. Un autre genre de dallage, tous ces gens qui ne se seraient jamais rencontrés. Brouillon mais pas sans cohérence. 

En repartant, une craie est serrée dans le poing. Il ne reste qu'à se rejeter à la ville et à lui en faire voir de toutes les couleurs. 

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